"Faire un malheur ; tout casser"

Provence-Alpes-Côte-d'Azur

On dit d'un renard qui s'attaque à des poules qu'il fait un chaple dans la basse-cour. On dit aussi de deux filles en pleine soirée essayage dans leur chambre qu'elles font un chaple ; on leur demandera ensuite de faire du rangement. On retrouve cette expression dans le roman "Treize reste raide" de l'écrivain Robert Merle.

On s'est trouvés à protéger ensemble un défilé de femmes. On lançait l'insurrection. Alors, évidemment, c'est le moment que les Américains ont choisi pour bombarder la ville. Ils ont fait un chaple, ils nous ont fracassés. Qu'est-ce que tu voulais faire après, les gens ramassaient les morts.

Le verbe chapler vient du latin cappulare, découper de la nourriture. On le trouve dès le XIIème siècle dans le célèbre poème épique La chanson de Roland, chapitre CXXVII, sous la forme de capler, mot guerrier qui signifie tailler en pièces, vaincre en combattant, décimer son adversaire. "Ki puis veïst Rollant e Oliver De lur espees e férir e capler !"

Dès le XVème siècle, le verbe, en usage dans tout le territoire, exprime l'action de réduire le pain en miettes. Il se manifeste sous deux formes, chapler et chapeler. Chapeler, disparu de notre vocabulaire, nous a laissé en souvenir la chapelure, pain séché, rapé ou émietté. Seules deux irréductibles régions ont conservé ce mot : en Rhône-Alpes, où il garde le sens de couper en morceaux, hacher et en Provence, où l'expression faire un chaple décrit un massacre annoncé... "Ce soir on vous met le feu, on va faire un chaple d'enfer" !

Les plus belles expressions de nos régions

Pascale Lafitte-Certa