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    Un thème commun pour une oeuvre exceptionnelle

    Comme on peut le constater, le thème de cette œuvre est des plus communs. Mais Degas y révèle la beauté des scènes les plus familières, que certains pourraient même considérer comme vulgaires. Le travail le plus banal qui soit, le travail de femmes qui plus est, dans un cadre populaire... Le travail harassant, qui pèse sur les épaules et fait courber le dos, avec son côté sordide de la sueur qui colle au front, qui rend la peau et les mains moites, qui fait transpirer... Ces deux femmes sont épuisées.

    L’une d’entre elles continue à travailler, les deux mains rassemblées sur la poignée en pesant de tout son poids sur son fer, le dos voûté et la tête basse. Une partie de sa frange de cheveu pend dans le vide, tandis que sur sa nuque des mèches s’échappent de son chignon.

    L’autre s’est redressée pour s’étirer légèrement et baille la bouche grande ouverte, ce que les peintres évitaient généralement estimant la posture trop vulgaire ; de sa main droite elle tient fermement une bouteille, de vin sans doute si l’on en croit la couleur rouge du cul de la bouteille, tant pour se désaltérer que pour y trouver du réconfort. Tout cela est parfaitement observé et remarquablement exprimé. Démonstration évidente, s’il en était encore besoin, que l’on peut faire du beau avec du simple, avec du commun, avec du banal même à condition que ce soit aussi avec du vrai.

    Cette précision et cette douceur dans le rendu des poses de l’extrême fatigue qui abrutit permettent au peintre de nous transmettre son attendrissement et sa compassion pour ces deux femmes du peuple écrasées par leur labeur.

    Il s’émeut avec pudeur de la souffrance humaine que révèle cette scène surprise à l’improviste sans doute, à moins qu’elle ne fut recherchée comme telle, alors qu’un autre aurait pu s’en servir pour faire du "misérabilisme" et provoquer la colère, voire l’indignation. 

    Une représentation réaliste de la condition humaine

    La facture avec laquelle Degas exprime ici à la fois sa compréhension et sa compassion, dans "ce siècle de fer", pour la dure condition humaine des plus démunis, ces prolétaires engendrés par millions par les conséquences tragiques de la révolution industrielle et des multiples soubresauts révolutionnaires que connaît alors notre pays, le choix du sujet et la manière de l’aborder placent l’inspiration de ce peintre dans la grande tradition de la peinture chrétienne.

    Par le choix du sujet d’abord, car la peinture chrétienne n’est pas qu’une peinture religieuse. Seule la culture et l’art chrétiens se sont intéressés, et cela avec une constance qui en fait une caractéristique, à la nature humaine, non seulement pour exprimer sa relation à Dieu, sa grandeur, sa beauté, sa dignité, la profondeur de ses sentiments, mais aussi pour témoigner de ses souffrances, de sa misère parfois, de ses difficultés de vie et d’être, et traduire une méditation sur l’irrémédiable besoin de rachat, de rédemption, de sa condition.

    L’inspiration créatrice de Degas participe de la tradition de la peinture chrétienne également par la façon dont il traite son sujet. Le poids du travail harassant et la misère de la condition populaire sont montrés ici avec pudeur et charité, avec tendresse aussi, non pour choquer, non pour révolter, mais attirer l’attention, pour émouvoir et susciter la volonté d’aider et de porter remède. Nouveau rappel de la démarche évangélique qui veut que ce soit pour les humbles et les malades que Dieu Lui-même soit venu en monde.

     

    Bon dimanche à tous !

     

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  • En dehors de la peinture religieuse, Murillo est surtout célèbre pour des scènes représentant les gens du peuple. Murillo y est réaliste, d'un réalisme très émouvant.

     

    murillo*

     

       Le Jeune Mendiant est une des principales œuvre et le premier tableau représentant un garçon des rues du peintre espagnol Esteban Murillo (1618-1682). Murillo fait parti du mouvement baroque espagnol du XVIIeme siècle. Il est, avec les peintres Diego Velazquez, Fransisco Zurbaran et José de Ribera, l'un des principaux représentants du siècle d'Or espagnol (période de rayonnement culturel de l'Espagne au XVIIeme siècle en Europe) et le chef de fil de l'école de Séville, second centre artistique de l'Espagne après Madrid. Bien que l'essentiel de ses œuvres soient religieuses comme La vierge du Rosaire, il est très reconnu pour ses peintures de genre, particulièrement ses portraits de femmes et d'enfants pauvres. Murillo eut une grande influence sur le réalisme et le rococo du XVIIIeme siècle espagnol.

      Le jeune Mendiant est souvent appelé "le jeune pouilleux" car il est en train de se débarrasser de ses puces.

     

    Description du tableau :

         Sur le tableau, on voit un jeune garçon vêtu de guenilles, aux pieds sales, assis par terre seul dans le recoin d'un intérieur délabré. A côté de lui, on trouve une cruche et un panier de pommes renversé ainsi que quelques restes de crevettes, qui attestent qu'il vient de déjeuner. L'obscur réduit qui lui sert de refuge, l'ouverture sans fenêtre et les murs et le sol sale concourent à représenter la plus grande pauvreté. Contrairement aux œuvres futures de Murillo, ici la pâte est rugueuse et les lumières sont très brutales, créant un contraste important entre les ombres de la pièce et la lumière provenant de l'extérieur. En effet, plus tard, le pinceau du peintre sera plus souple et les lumières plus douces. Malgré sa pauvreté, l'enfant est représenté gracieux, beau et tendre, contrairement à la plupart des représentations d'enfants pauvres à l'époque où ceux-ci étaient beaucoup plus austères voir difformes. Murillo a ici voulu figurer la pauvreté et non la déchéance. On peut remarquer énormément de détails comme la paille tressée du panier, les rebords de la cruche qui rendent le tableau encore plus réalistes.

     

    Interprétation :

        Le Jeune Mendiant est un des tableaux les plus tristes de Murillo. En effet, en plus de la pauvreté, cet enfant souffre aussi de solitude : le dépouillement nous prouve qu'il ne peut compter que sur lui-même pour cet acte d'habitude maternel. Murillo se sert de ce geste pour souligner le statut d'orphelin. Il fut lui-même orphelin dès l'age de 10 ans. Le peintre a sans doute été inspiré par la misère régnant dans les rues de Séville au siècle d'Or. Les enfants des rues était un sujet très fréquent pour les peintres espagnols de cette époque.

     

    Bonne semaine à tous !

     

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